24.1.07

À la télé, un Turc est un... skater !


On ne saurait trop dire à quel point la télévision est trompeuse. Elle est loin de refléter le langage courant mais n’utilise pas pour autant un langage particulièrement châtié. Il faut plutôt parler d’une sorte de politiquement correct qui sévit.

Pour en prendre conscience, voici un petit florilège de corrections demandées par les chaînes de télévision et autres diffuseurs de films et téléfilms aux auteurs de sous-titrage et de doublage, évoquées le vendredi 12 janvier lors d'un débat sur leur « liberté d'écriture » organisée par la Sacem.

Pas de noms de marques : lorsqu'un personnage parle d'une « Mercedes », il dit « voiture de sport allemande » dans la version française, et lorsqu'il prend du « Prozac », il prononce « antidépresseurs ». Le « Coca-Cola » devient « soda » ou « boisson gazeuse », le « scotch » du « ruban adhésif », et une « action Vodafone », une « action des opérateurs téléphoniques ».

On ne trouvera pas non plus de noms à consonance étrangère. Un auteur a rapporté le contenu de cet e-mail, adressé par un correcteur, lui demandant de « franciser tous les noms allemands » d'une série : « Il n'est pas nécessaire que le téléspectateur apprenne dès les premières secondes de l'épisode qu'on est en Allemagne, il le saura bien assez tôt ». De même, dans une série italienne, un autre a demandé que les « carabinieri » en uniforme deviennent des « gendarmes » et que tous les prénoms italiens soient francisés.

Enfin, on s’y attendait, sont interdits les termes politiquement incorrects : « fuck », assez courant dans les films et téléfilms américains, disparaît en VF aux heures de grande écoute. On ne peut traduire « gas chamber » par « chambre à gaz » concernant l'exécution des condamnés à mort aux Etats-Unis, car « cela évoque trop les nazis» , selon un correcteur.

Pour les enfants, c’est encore plus draconien. Pour le doublage d'une série pour jeune public, on a exigé : « Pas de termes péjoratifs, pas de référence religieuse, de référence au corps, à la chirurgie, aux maladies honteuses ou à la mort ». De même, des « grosses » sont devenues des « idiotes » et des « Turcs » des « skaters », dans la VF d'une série allemande pour la jeunesse.

Alors, c’est vrai, ce n’est pas utile d’abreuver nos chères têtes blondes de gros mots, dans le stade de la création. Mais s’ils existent en VO, pourquoi les cacher ? Le problème est encore plus vaste, c’est celui des doublages en français. Ils sont souvent catastrophiques, ôtent toute une dimension de l’original (humour qui disparaît...) mais, plus grave, empêchent parfois de comprendre certaines scènes car un détail est passé à la trappe dans la conversation. C’est assez honteux, vis-à-vis des auteurs originaux et vis-à-vis des spectateurs. Cela mériterait une expression « assez courant[e] dans les films et téléfilms américains » !

Source : AFP, 13 janvier 2007

1 Comments:

At 1/24/2007 6:20 PM, Anonymous Anonyme said...

C'est à la télé québécoise ??
Bonne semaine.

 

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