11.5.06

« Coucher » en tout bien tout honneur


Freud Divan
Originally uploaded by Rêverie musicale.
Jusqu’à présent, le 150e anniversaire de la naissance de Sigmund Freud se faisait à Vienne relativement discret. Depuis le week-end dernier, cela commence à démarrer, autour d’un objet particulièrement symbolique : le divan, cet instrument du psychanalyste où s'allongent les patients.

L'exposition, qui se situe au 19 de la Berggasse où le Dr. Freud vécut et exerça de 1891 à 1938 dans la capitale autrichienne, s’intitule « Le divan : la pensée allongée » (voir photo) et montre une série de variations artistiques et historiques autour du thème de cet objet (l'allemand emploie désormais le mot anglais « couch », du français couche), avec plusieurs meubles dont un du célèbre architecte de l'Art nouveau viennois Otto Wagner. Mais elle est en fait construite autour d'une absence : celui du fameux divan avec couverture orientale, où les patients de Freud s'étendaient pour parler en « associations libres » et donner accès à leur inconscient, sans voir directement le psychanalyste qui était assis à côté. Car le meuble originel est resté au musée Freud de Londres, la ville que Freud gagna avec ses proches pour échapper à la folie antijuive des nazis entrés en Autriche.

Pour se rattraper, Lydia Marinelli, conservatrice du musée Sigmund Freud de Vienne, a déclaré à la presse en fin de semaine dernière : « les choses qui manquent font plus réfléchir que celles qui sont présentes ». Vlan ! Une sorte d’acte manqué, donc, une exposition « en creux ». Madame Marinelli note que le divan, ou sofa, est plein d'ambivalences : on y est assis ou couché, on peut y rêver, mais c'est aussi un lieu de contacts amoureux.

Dans cette exposition, on voit des surréalistes influencés par les thèmes freudiens de l'inconscient ou de la sexualité comme Max Ernst, ou d'autres artistes comme le Suisse Félix Valloton. Notons qu’Andy Warhol utilisa le divan dans sa « factory » pour produire des images artistiques et que son film érotique Couch (1964) est projeté au musée. L'exposition montre aussi les traitements imposés aux malades jusqu'à la fin du XIXe siècle.

Près de 60.000 personnes visitent chaque année le musée, installé depuis 1971 dans l'appartement du « père » de la psychanalyse. En cette année anniversaire on en attend jusqu'à 100.000, indique Inge Scholz-Strasser, présidente de la Fondation privée Sigmund Freud. Regrettant les problèmes financiers de la maison Freud, malgré une aide de la municipalité, Madame Scholz-Strasser s'est demandée, lors d'une conférence de presse, « s'il y a une volonté politique en Autriche concernant cet Autrichien célèbre dans le monde entier ».

Il exista en fait une relation d' « amour-haine » (intéressant, intéressant...) entre Vienne, certes capitale intellectuelle mais soumise à l'antisémitisme, et Freud, penseur au style de vie conservateur mais qui choqua par sa pensée révolutionnaire. « Croyez vous qu'il serait aujourd'hui accepté par un véritable Viennois ? », s'interroge la dernière patiente survivante de Freud, Margarethe Walter, 88 ans, qui témoignait dans le journal Der Standard samedi d'un médecin « extrêmement amical et calme ». Aujourd'hui encore il a droit à un petit square mais il n'y a pas de rue Freud à Vienne.

Si on compare avec les innombrables festivités en 2006 commémorant le 250e anniversaire de l'enfant chéri Wolfgang-Amadeus Mozart, l'Autriche rend hommage plus sobrement à la naissance de Freud, le 6 mai 1856 à Freiberg, en Moravie (dans l'ex-empire austro-hongrois), aujourd'hui Pribor (République tchèque). Un symposium est malgré tout prévu à l'automne pour étudier « les aspects psychanalytiques des personnages de femmes » dans cet opéra complexe qu'est le  Don Juan  de Mozart et du librettiste Lorenzo Da Ponte. De quoi réconcilier les deux anniversaires.

Enfin, moi, le titre de l’exposition me titille l’esprit : « la pensée allongée »... et pourquoi pas « la pensée horizontale » non plus ? Cela irait bien avec l’ambiguïté du divan soulignée ci-dessus ? Imaginons même : « La Goulue sur le divan  : une grande horizontale à niveau  (pour ne pas dire en... non, je ne le dirai pas, pardon Martine, aïe !...) !»,

— Exposition Die Couch, vom Denken im Liegen, à voir jusqu'au 5 novembre 2006, Berggasse 19, 1090 Vienne.
— Site internet : www.freud-museum.at. Vous pourrez y voir quelques photographies de l’exposition et visiter la boutique en ligne. Au menu des posters ou des tee-shirts sur lesquels on peut lire : « Analyse me ! ». Tout un programme !

Source principale : AFP, 8 mai 2006

1 Comments:

At 5/11/2006 8:47 PM, Anonymous Anonyme said...

Il y a un super article sur Freud dans psychologie magazine du mois !
Bonne soirée et à très bientôt.

 

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