6.6.05

La bande dessinée n'est pas non plus un art mineur







Tous les trentenaires et quadragénaires ne pourront qu'être intéressés et même interpellés par cette bande dessinée récente parue en janvier dernier, au crayonné nerveux et anguleux, dont la narration se veut autant littéraire que plastique.




C'est le premier album d'un jeune auteur d'une vingtaine d'années, formé à l'ESI et en résidence à la Maison des auteurs d'Angoulème depuis un an, Cyrille Pomès. Comme les très grands (cf. Homère...), plusieurs villes s'arrachent déjà le privilège de l'avoir vu naître, puisque certains le disent Nantais (Nantes poche, 2-8 mars 05, p. 43), d'autres Angoumoisin (http://bd.amiens.com/auteurs/pomes_cyrille_367.html).

Comme le laisse entendre la couverture et le très joli titre, il est question dans cet album d'une lettre, que le héros, Patrick, s'était écrite à l'âge de dix-sept ans pour le temps où il en aurait quarante et qu'il arrive, non sans mal, à récupérer. A l'époque de l'écriture, c'était l'âge des idéalismes. "Dis-moi qu'on a donné tort à tous ces cons", s'écrivait-il pour le futur.
Malheureusement, comme vous l'avez compris, le présent est loin d'être à l'aune des idéaux passés. Le jeune artiste qui refusait le mercantilisme travaille dans une boîte de publicité, ses amours sont allées à vau-l'eau, il voit toujours Lorena mais n'arrivent jamais à recoller les morceaux. Bref, c'est loin d'être la joie.

La trouvaille de cet album (certains la disent éculée, je la trouve très efficace) est que tout est raconté à rebours : l'ouvrage s'ouvre au moment où Patrick a quarante ans et récupère la lettre. Puis, toutes les étapes sont vécues à l'envers. Si bien qu'au début, le lecteur n'a que peu d'éléments pour comprendre l'histoire et les protagonistes. Mais que tout se met en place au fur et à mesure de manière magistrale. Et la fin, la séquence des dix-sept ans, qui est en fait le début de l'histoire (elle est intitulée "où le début prend fin"), est vécue comme une apothéose.

Bien sûr, c'est loin d'être gai. Certaines scènes sont très crues (les dialogues désabusés, la chair quasi morte). Mais cela est à l'image des errances, des doutes permanents, des manques de repères et des vies déglinguées de beaucoup de nos contemporains. En tout cas, c'est magnifiquement raconté et construit.

Les critiques ont presque toutes été unanimes ("coup de coeur de ce début d'année" dans La Nouvelle République). Cela vaut le coup d'y jeter un coup d'œil.

Cyrille Pomès, à la lettre près, Paris : Albin Michel, 2005. 15 €

4 Comments:

At 6/06/2005 6:19 PM, Anonymous Anonyme said...

A ma prochaine visite chez Cultura.. et c'est fréquent, j'y regarderai avec beaucoup d'attention.
Merci d'offrir toute cette culture

 
At 6/07/2005 12:25 AM, Anonymous Anonyme said...

ça donne envie de se pencher sur le Pass'é des autres.... pour une fois !!!!... et toi à 17 ans tu rêvais de musique et de quoi ?

 
At 6/07/2005 8:23 AM, Blogger Rêverie musicale said...

A 17 ans, je découvrais la philosophie et la musique du XXe s., je rêvais d'être professeur, flûtiste professionnel ou chef d'orchestre.

 
At 6/07/2005 2:05 PM, Anonymous Anonyme said...

ça va alors, pari tenu !!! (et c'est Pascale qui le dit Môssieur le philosophe ;o) )

 

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