Canardages 26 octobre 2005
Pour ma revue de presse hebdomadaire du Canard enchaîné, je suis désolé de n’avoir à vous proposer que deux articles, ayant oublié mon exemplaire chez mes parents ! J’avais par contre déjà mis de côté ces deux articles particulièrement édifiants sur la manière dont, une fois de plus, notre pays est géré. Et une fois de plus, seul Le Canard enchaîné en parle…
I – Tout d’abord, on apprend qu’après Robien (voir Canardages précédents), c’est Perben, Clément, Alliot-Marie ou Dutreil, qui utilisent simultanément le transport aérien (pour eux) et le transport routier (pour leur chauffeur). Merci les dépenses inutiles. De plus, pour les trois derniers, il y a tout un jeu de plaques interchangeables, dignes d’un monde auquel nos ministres ne devraient pas appartenir, car les voitures du ministère servent aussi aux campagnes électorales personnelles de nos ministres ! Mais je laisse la parole au Canard :
***********************************
Perben mérite une bonne paire de plaques
DOMINIQUE PERBEN l'avait bien caché, mais il possède un don extrêmement rare : le don d'ubiquité minéralogique.
Le ministre des Transports, ça ne s'invente pas, dispose de deux plaques d'immatriculation (et de deux cartes grises) pour sa voiture de fonction, une Peugeot 607 bleu marine. Et, comme l'a raconté « Le Parisien » (24/10), chaque fin de semaine, dans la cour de on ministère, boulevard Saint Germain, la même scène digne d'un mauvais polar se reproduit. Le vendredi matin, un fonctionnaire du ministère dévisse la première plaque inimatriculée 75 (à Paris, donc) pour la remplacer par la seconde, numérotée 69, département du Rhône. Le chauffeur de Perben prend ensuite, seul, le volant du véhicule direction Lyon, tandis que le ministre, lui, rejoint dans la soirée cette ville où il passe ses week ends... mais par l'avion ou le TGV.
Et le lundi, quand Perben remonte vers Paris ? « Le Parisien » ne le raconte pas, mais le manège continue. Tandis que son chauffeur reprend la route et Perben l'avion ou le TGV, une autre bagnole de fonction attend le ministre dans la capitale : une VelSatis, cette fois immatriculée 92 (Hauts de Seine). Mais qui possède toutefois le même avantage que la Peugeot 607 : elle dispose, elle aussi, d'une plaque de rechange 69, au cas où la Peugeot tomberait en panne. Au total, le ministre dispose donc de deux véhicules et de quatre plaques d'immatriculation. A faire pâlir de jalousie les automobilistes traqués par les radars. Et contrarier un peu les contribuables qui financent ces ballets d'allers retours entre ciel et terre.
Mais pourquoi tout ce cirque ? Le parachuté Perben croit que rouler le week end aux couleurs locales lui permet de séduire les électeurs de Lyon, cité qu'il brigue en 2008. Ce bricolage est autorisé par une circulaire de 1991 : il a été réalisé avec l'accord du ministère de l'Intérieur, qui a fait établir pour Perben ses cartes grises et plaques lyonnaises au nom de la préfecture du Rhône. Résumé de l'affaire livré, sans rire, au « Canard », par un membre du cabinet du ministre : « Tout cela est légal. Et n'a rien à voir avec 2008. C'est uniquement une question de sécurité. M. Perben a reçu des menaces des autonomistes basques lorsqu'il était garde des Sceaux... »
Mais que Perben se rassure, il n'est pas le seul ministre à pratiquer le sport de la double immatriculation : « Pascal Clément (Justice) et Michèle Alliot Marie (Défense) ont également une double immatriculation dans leur région », balance un haut fonctionnaire. Qui oublie de citer, au passage, un autre cas intéressant : celui de Renaud Dutreil.
Le ministre des PME, qui compte sauter en parachute sur Reims en 2008, jouit d'une 607 Peugeot grise avec une plaque minéralogique unique, aux couleurs de la Marne (51). Il faut bien qu'il la joue « local », lui aussi, d'autant que sa concurrente et collègue Catherine Vautrin est bien du coin.
A moins que Dutreil n'ait, comme Perben, les Basques aux fesses...
**********************************
II – Des étudiants inscrits en agrégation, le concours le plus difficile de l’Éducation naionale, viennent d’apprendre, un mois et demi après le début de leurs cours, bref, de leur année universitaire, qu’ils pouvaient désormais aller à la pêche : leur concours vient d’être supprimé ! Ceux qui pensaient y consacrer leur année n’ont plus qu’à se reconvertir. Ce n’était pas bien grave : dix places seulement, une centaine de candidats, cela ne va pas faire beaucoup de bruit. C’est ce qui se passe effectivement.
Pour tous ceux qui ne seraient pas au courant du fonctionnement de l’Éducation nationale (mais est-ce bien différent dans d'autres administrations ?), sachez que ce genre de manœuvre est courant, qu’il n’y a bien sûr jamais aucun interlocuteur pour vous répondre sauf sous la pression. Bref, sachez-le, les enseignants subissent depuis des années ce genre de tracasseries et se sentent continuellement méprisés par le système. Vous comprendrez mieux dès lors les mouvements fréquents dans ce milieu. Je ne dis pas qu’ils sont toujours justifiés. Je dis qu’ils correspondent à un climat instauré par l’autisme de nos dirigeants.
************************************************
Casse ton agrég’ d'abord !
INSCRIT à l'agrégation de physique option « procédés physico chimiques », l'étudiant Florent Quiquerez n'avait aucun pressentiment en ouvrant sa boîte aux lettres le vendredi 14 octobre... Surprise, une enveloppe postée la veille de la Maison des examens à Arcueil l'y attendait : une gentille attention de l'Education nationale, peut-être ? A l'intérieur, une note de dix lignes, sans en tête et non signée, expliquait avec grâce : « Dans le cadre de l'évolution en cours et engagée en 2004 2005 des concours de sciences physiques, l'agrégation option "procédés physico chimiques" sera fermée à la session 2006. »
Traduction : son agrèg' est supprimée jusqu'à nouvel ordre. Comme ça, un mois et demi après le début des cours ? Voilà qui est plus fort que le potassium ! Florent a d'abord cru à un canular, car aucun des sept camarades avec qui il suit la préparation assurée par l'ENS de Cachan (Val de Marne) depuis le 5 septembre n'a reçu de courrier similaire. Renseignement pris auprès du service des concours à Arcueil, qui a dabord démenti, il a ensuite téléphoné au bureau des concours au ministère, qui, lui, a confirmé, non sans embarras, la mesure. Un comble : c'est Florent qui a dû apprendre la suppression du concours à toute sa promotion et même à ses profs de Cachan ! Sans doute un essai de communication par capillarité tenté par Robien en grandeur réelle ?
Cette nouvelle option à l'agrèg' de physique avait été ouverte en 2000, pour environ dix postes par an, et comptait une centaine d'inscrits. Sur les huit « agrégatifs » de Cachan, sept s'étaient installés à Paris exprès pour le concours, et six se retrouvent le bec dans l'eau, leur formation d'ingénieurs spécialisés ne leur permettant pas de s'inscrire dans une autre option de l'agrèg' de physique. L'un d'eux avait même décliné une embauche comme ingénieur chez Alstom... De son côté, le département de physique de ENS de Cachan avait engagé toute une équipe pédagogique, et loué un labo à l'université d'Orsay un jour par semaine pour les TP. Pour rien ? Merci Robien !
« Nous ne contestons pas le fond de la décision, mais la forme: comme ça, par une simple note, en cours d'année... » font valoir sans s'énerver les étudiants, qui imaginent, à sa décharge, que la Direction des personnels enseignants du ministère, disposant d'une enveloppe restreinte, a dû trancher dans le vif au dernier moment. Vu qu'il n'est plus temps de s'inscrire dans une autre filière, ils risquent pourtant de perdre une année entière d'études...
Interrogé par « Le Canard », un fonctionnaire du ministère de l'Education nationale reconnaît, gêné : « C'est très rare et même exceptionnel que la décision tombe si tard, mais c'est qu'elle a été mûrement réfléchie. » Ou hâtivement prise ? C'est peut-être aussi par pudeur que la mesure n'a pas été annoncée officiellement, mais en catimini, par la méthode poétique de la bouteille à la mer... L'ancien doyen de l'Inspection des sciences physiques, Claude Boichot, explique que cette option était menacée depuis deux ans, faute d'attirer suffisamment de candidats, mais il n'explique pas le caractère tardif et brutal de la décision.
Robien, dont le cabinet reste aux abonnés absents, a peut être voulu réaliser une expérience de physique amusante sur le moral des étudiants !
*********************************
That's all folks !
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home